mardi 27 mars 2018

L’énigme des « boules de feu vertes »


De décembre 1948 à janvier 1949, une « vague » sans précédent de « boules de feu vertes » célestes fut signalée dans le sud-ouest des Etats-Unis : au-dessus de l’Etat du Nouveau Mexique (NM) et, plus précisément, dans une zone très sensible stratégiquement. Là où se trouvaient justement des installations militaires et des laboratoires secrets  liés au programme de recherche et de développement nucléaire du pays ; ainsi, ces observations ne furent pas prises à la légère de la part du Pentagone.

L’ufologue William L. Moore publia, en 1983, un dossier de 183 pages de documents déclassifiés grâce à la loi sur la liberté de l’information (Freedom of Information and Privacy Acts), marqués soit « SECRET », soit « Confidential », concernant ces boules vertes.

On y trouve une note estampillée « Secret » de l’AFOSI (bureau d’investigations spéciales de l’US Air Force) qui cite 11 témoignages rien que pour le 5 décembre 1948, dont celui de pilotes militaires.

En voici un, selon Ruppelt (1) :

« Ce jour-là, à 21 h 27, un C-47 de transport volait à l’altitude de 5 500 mètres, à 15 km à l’est d’Albuquerque, piloté par le capitaine Goede. Tout à coup, l’équipage aperçut une boule de feu verte qui traversait le ciel sur l’avant de l’appareil. On eût dit un grand météore, n’eût été cette couleur verte et le fait que la trajectoire ne s’inclinait pas vers le sol, comme celle des météores habituels. Cette boule, partie de très bas, des environs des contreforts orientaux des Sandia Mountains, avait monté légèrement puis paru devenir horizontale. D’autre part, elle était trop grande pour un météore, du moins pour un de ceux que l’équipage du C-47 avaient vus jusque-là. Après discussion, les aviateurs décidèrent de signaler leur observation, d’autant plus qu’ils avaient aperçu un objet identique, vingt-deux minutes plus tôt, au nord de Las Vegas, au Nouveau Mexique ». Ils avaient pris initialement cette première lumière verte brillante pour un météore mais elle avait semblé  être beaucoup trop proche du sol. Le Capitaine Goede téléphona à Kirkland pour dire qu’il avait dû dévier l’avion pour éviter la collision. La lumière avec sa queue vert pâle avait amorcé une courbe descendante et disparu en quelques secondes.

Le même soir, 5 civils avaient rapporté entre 19 h 30 et 22 h des boules vertes volantes observées du sol, de Las Vegas à Lucy dans le même Etat. Cette note de l’AFOSI faisait suite à une enquête lancée dès le lendemain par le commandement du 7ème district à Kirkland (base de l’US Air Force située au sud-est d’Albuquerque, Nouveau Mexique) qui finalement recensa une quarantaine d’observations jusqu’au 12 avril 1949.

Un spécialiste, ayant étudié les observations de ce jour-là, mettra pas moins de 8 boules de feu différentes en cause.

J. Clarke (2) y ajoute pour le même soir du 5 décembre « une boule de feu brillante filant vers l’ouest à grande vitesse à l’horizontale » rapportée par un automobiliste voyageant sur la « Highway » 60, près de Bianca, au Colorado.

Tout est dit ou presque sur ce « nouveau phénomène » (3).

Les observations furent tellement régulières ensuite – chaque nuit – que, consécutivement à l’enquête lancée le 6 décembre, deux officiers des renseignements de Kirkland se mirent à croiser juste avant le coucher du soleil au nord d’Albuquerque, le 8 décembre. Et ils rencontrèrent à l’est de Las Vegas un objet mystérieux à 18 h 33 très exactement. Leur rapport parle d’un objet se situant à environ 600 mètres plus haut que l’avion, s’en rapprochant à vitesse élevée sous une inclinaison de 30° à gauche et ressemblant à un feu de Bengale vert, plus grand et à l’éclat plus intense. Sa trajectoire était « plate » parallèle au sol ; elle s’inclina brusquement.

Les états-majors devinrent franchement nerveux quand, le 11 décembre, une boule de feu fut repérée au-dessus du site nucléaire de Hanford (WA) et un autre près de Memphis (TN), non loin de l’usine d’enrichissement d’uranium de Oak Ridge.

La ressemblance des objets inconnus avec des météores avait déjà conduit à consulter le Dr Lincoln La Paz (4), directeur de l’Institut des Météorites à l’Université du Nouveau Mexique, et grand expert en la matière.

Dr Lincoln La Paz (source WEB).

Or, celui-ci observa, le 12 décembre 1948, un brillant « météore » vert à 2 h du matin alors qu’il circulait sur une route près de Bernal, en compagnie de deux patrouilleurs civils de Kirkland : une boule verte grosse comme un quart de la lune, aussi brillante que Vénus en vol horizontal visible pendant deux secondes.

Dessin illustrant un article sur les boules de feu du Sud-ouest publié par The International UFO reporter de septembre 1985.

 Or, depuis 1915 que le Dr La Paz observait des météores (il en avait vu 414 du type de « Geminid »), c’était le premier qu’il voyait de couleur verte ! Les météores « normaux » apparaissent blanc, teintés d’orange ou de rouge.


Météore Leonid photographié par l'astrophotographe Steve Dunn en 1998 (source WEB).
 Le 20 décembre, dans un mémo confidentiel Top Secret, La Paz affirmait que la boule de feu était trop lente (13 à 16 km/seconde contre 50 à 65 pour les astéroïdes), trop basse (13 à 16 km) et trop silencieuse » pour un météore (les météores se consument au dessus de 60 km avec un fort grondement). Sa trajectoire horizontale ne correspondait pas avec celle, courbe, des aérolites. La taille d’un tiers de la lune rapportée par d’autres témoins était aussi trop grosse.

Une opération de « triangulation » indiqua que l’objet avait très certainement survolé Los Alamos, autre endroit très sensible, ce qui attira surtout l’attention !

Des patrouilles furent organisées avec des membres des services de sécurité à l’énergie atomique équipés de « caméras radars » dont une photographia le 18 décembre un météore normal. Le 20, alors que l’on remballait le matériel, une boule de feu apparut qu’on ne put hélas photographier mais qui, elle aussi, semblait se diriger vers Los Alamos !

Le 30 janvier 1949, des centaines de témoins virent passer « un météore vert »  venant du nord-ouest et disparaissant au sud-ouest en direction de Roswell, NM. Kirkland lança une enquête immédiate soulignant que le commandement local était perturbé par les implications du phénomène. La Paz, à partir des données récoltées auprès de dizaines de témoins et malgré une chasse poussée de plusieurs jours jusqu’à Lamesa, Texas, ne trouva ni point d’impact, ni débris (sondage du sol avec des perches en acier !) au point de chute présumé. Le « météoriste » particulièrement perplexe élimina dès lors l’origine naturelle des boules vertes en faveur « de missiles tirés par quelqu’un dans l’atmosphère terrestre » : des missiles radio-contrôlés pouvant être dirigés là par des agents ennemis. Des missiles équipés d’un système d’autodestruction ? Essais secrets ennemis à inscrire dans le contexte de réarmement du bloc communiste ? Mais même dans ce cas, on devait bien trouver quelque débris qui analysés dans un laboratoire permettraient de déterminer leur provenance (terrestre ou extraterrestre ?). 

Huit jours plus tard, une conférence sur les phénomènes aériens eut lieu, le 16 février 1949, dans les locaux du Laboratoire Scientifique de Los Alamos avec des militaires et des scientifiques dont La Paz et des représentants du projet UFO « Grudge » (5) (il y avait là plusieurs témoins des boules de feu vertes, dont La Paz). C’est là que le Dr Joseph Kaplan de l’Université de Californie à Los Angeles, sollicité lui aussi pour une investigation sur le phénomène – elle avait porté sur 46 observations,  assura qu’il n’y avait aucun exercice d’entraînement secret dans cette région (pas d’appareil secret US) ; car le cloisonnement dans les différents secteurs secrets de l’administration US étaient tels qu’on se demanda aussi s’il ne s’agissait pas d’un projet militaire technologique américain ultra secret (6).

A cette occasion, les représentants de « Grudge » ne manifestèrent aucun intérêt pour ce que Kaplan qualifiait le 27 avril « d’un phénomène d’extrême importance pour la défense nationale des Etats Unis ».

Edward Teller (7), présent, indiqua que, selon lui, les  caractéristiques des boules de feu vertes accréditaient l’idée un phénomène « non solide mais plutôt électro-optique » ! La Paz demandait déjà des moyens et des hommes.

Mais l’AFOSI ne parvint pas à les lui fournir (restriction du budget militaire depuis la fin de la guerre oblige). Et ce, malgré une nouvelle offensive des boules de feu vertes survenue en mars 1949 rapportée dans la région de Killeen et du site de stockage d’armes nucléaires de Camp Hood, au Texas, base très très sensible, on s’en doute : des lumières, tout d’abord aperçues de diverses couleurs : blanches, bleues, jaunes, rougeâtres, violettes, qui, en final, tournaient au vert. Les 16 et 18 avril de mystérieux flamboiements (flares) furent rapportés. Plutôt que les responsables de « Grudge », La Paz et Kaplan furent saisis pour chercher des explications. La Paz, dans un briefing de 3 heures en compagnie de Kaplan le 27 avril devant le personnel  du projet des armes spéciales des forces armées à la base Sandia (laboratoire où étaient assemblés les éléments de la bombe atomique, près d’Albuquerque), soumit ses plans de mise en place d’un réseau d’observation visuelle, photographique, spectrographique et radar couvrant les zones de Los Alamos, Sandia, Holoman et White Sands pour y localiser des fragments.  La région de Camp Hood/ base de Killeen fut inclus car, après 15 jours d’inactivité, les « flares » avaient repris dans la nuit du 16 avril. Quatre furent vues une fois en même temps ; en une autre 8 à 10 ! Ce spectacle pyrotechnique n’avait rien à voir avec une pluie de météores.

Le 19 avril 1949, l’AFOSI à Kirkland envoya aux quartiers généraux de l’Air Force la liste de tous les rapports (39) des boules vertes sur lesquelles elle avait enquêté, dont 25 de couleur verte (les autres étaient blanches voire oranges). Elle y dévoilait les 6 caractéristiques du phénomène :
a/ couleur « atypique » : verte, blanc-verdâtre, jaune-vert et bleu-vert ;
b/ trajectoire horizontale avec parfois des écarts mineurs ;
c/ vitesse inférieure à celle d’un météore mais supérieure à tout type d’engins volants connus ;
d/ aucun son associé à l’observation ;
e/ pas de queue persistante ou de nuage de poussière ;
f/période de visibilité une à 5 secondes.

Les boules vertes continuèrent de se montrer dans la région au rythme d’une demi-douzaine environ par mois. Une conférence à Camp Hood, le 4 mai, en présence de personnel de l’espionnage dont le FBI, parla de menace de sabotage : on décida de créer 4 postes d’observation aussitôt opérationnels à quelques miles au sud-est de la base de Killeen, postes de surveillances seulement car on manquait de caméras !

Le 19 mai, le colonel Lumsden, du bureau de l’AFOSI à San Antonio, déclarait que « le phénomène inconnu dans la région de Killeen ne pouvait être attribué à des causes naturelles ». A Washington, au même moment, on déclarait le contraire ! Kaplan penchait pour « un nouveau type d’effet auroral » (aurores boréales), concédant que celui-ci était « difficile à expliquer » aussi loin des régions magnétiques polaires.

Le 24 juillet, une boule de feu verte était observée plongeante près de Soccoro. C’est à cette occasion que des échantillons d’air prélevés dans la région révélèrent la présence de microparticules de cuivre dans la poussière ambiante. Or jamais la plus petite particule de cuivre n’avait été détectée d’origine météoritique et la couleur verte décrite par les témoins évoquait le spectre du cuivre (5200 angströms), cuivre normalement oxydé dès que l’entrée dans l’atmosphère terrestre. Le Professeur Fred L. Whipple, de Harvard, voyait, lui dans la couleur verte, la présence de magnésium incandescent.

Entre juin et août, « de nombreuses boules de feu vertes maintenant apparaissant dans un mouvement descendant presque vertical au-dessus du Nouveau Mexique » furent repérées, particulièrement durant les week-ends !

Le 31 août 1950 une boule verte fut observée après le lancement d’une fusée V-2 de la base de l’Air Force de Holloman AFB, à Alamorgordo, NM.

A la fin de l’été 1949, fut créé le Projet Twinkle (sous-commission du Projet Grudge) ; lancé à Vaughn (NM) là où plusieurs boules vertes avaient été signalées, dont une boule blanche vue exploser sans bruit, le 23 novembre 1949, par un Colonel de l’armée US. Il fut transféré après trois mois à la base Holloman et faute de moyen - seulement un des trois cinéthéodolites (caméras de repérage) demandé fut utilisé -  ne photographia rien du tout et, de la sorte, conclut dans son rapport final de décembre 1951 : « qu’aucune conclusion scientifique n’avait pu être apportée dans cette région qui aurait pu donner lieu à un tel phénomène » (les boules de feu vertes). Et ce, bien que, le 23 août 1950, le personnel opérant dans le cadre du projet ait repéré « 8 à 10 objets du phénomène aérien » (sic). Des rumeurs coururent d’un prolongement du projet avec un champ plus large.

Le Capitaine Ruppelt tomba sur cette affaire en 1951 quand il fut nommé à la tête du Project Blue Book. Et il s’en passionna au point de retourner sur place.


Illustration du chapitre de Ruppelt reproduit texto in
FATE, juin 1957.
Lors d’un repas à Los Alamos, il mit le sujet sur le tapis et un pilote lui décrivit le phénomène comme une balle de tennis recouverte de peinture fluorescente lancée par quelqu’un situé à 30 mètres. Comme hypothèse ce jour-là, fut envisagée « une sorte d’engins d’essai, projetés dans notre atmosphère par un « vaisseau-mère » planant à plusieurs centaines de kilomètres au-dessus de la Terre. En clair : des essais menés de l’espace par des extraterrestres identiques à ceux qu’on aurait nous-mêmes programmés pour tester l’échauffement aérodynamique avant de se poser sur une planète étrangère lors d’une opération de débarquement !

Tous les savants parlaient d’une chose « terrifiante », « aussi grosse que la Lune » d’où le dessin reproduit par Life, dans un article paru le 7 avril 1952.


Le dessin de Life (1952).
A l’automne 1951, en 13 jours, 9 boules de feu vertes furent observées dans 5 Etats du sud-ouest américain. Le Dr Lapaz déclara dans Time du 19 novembre qu’une chute de 9 météorites brillantes par an dans une région comparable devait être considéré comme exceptionnelle. Le 2 novembre, 165 rapports écrits furent collectés concernant une « boule de feu verte » géante. Elle fut décrite comme ayant la couleur d’un tube néon vert par trois étudiants de l’Université de New Mexico. Jusqu’à fin 1951, l’observation des boules vertes se limita au sud-ouest des Etats-Unis ; aucune ne fut vue ailleurs.

En 1952, lors de la plus grande vague d’ovnis enregistrée en Amérique (plus de 1000 observations dans l’année), le nombre des « boules vertes » surpassa celui de 1948. Ensuite, leur nombre diminua considérablement. Le 18 septembre 1954, une énorme boule de feu verte passa lentement au-dessus du Colorado et du Nouveau Mexique. Une autre fut aperçue le 19 juillet 1956 à Arkansas City, AR : la tête de l’objet fut décrite comme étant de couleur verte ou bleu-vert. Durant la vague d’ovni de 1957, il y en eu encore  mêlées aux « ufos » d’autres couleurs ; en mars 1958, une boule feu à queue verte vu repérée au dessus de Oakland, Californie. En 1963, il y eut encore un regain d’observations… Plus récemment, j’ai relevé des lumières vertes au-dessus de Mansfield (Ohio) en 1988, d’autres dans le ciel du Kentucky, en 1992, mais certainement beaucoup m’ont échappé.

Côté interprétation, les documents secrets témoignent que La Paz, dès le début, douta de l’hypothèse « météores » ; du moins ceux traditionnels car il envisagea qu’ils pourraient être des rencontres avec de l’antimatière : notre système solaire aurait-il atteint un coin nouveau de l’univers contenant du matériau « contraterrene » (de l’antimatière) qui au contact de l’air aurait produit ces boules vertes de lumière d’un genre nouveau ? Il réfuta l’idée des « météorides » type « Bielid », apparus en 1905 et avancée par des collègues : «  ces boules d’aujourd’hui, affirmait-il, ne ressemblent à aucun « Bielid » vu auparavant. « Les prendre pour des Bielid c’est comme surveiller un tir d’obus éclairant verts de 240 mm durant un bombardement de balles de fusils rouges ».
La tentative d’assimiler les boules de feu vertes à la foudre en boule fit long feu, si j’ose dire, du fait de la longue durée de l’observation et de l’absence d’orage concomitant.

Une ultime tentative d’explication des boules de feu vertes vint en 1959 quand Donald H. Robey, de la General Dynamics Corporation, lança l’hypothèse des « cométoïdes » : des objets dans un état physique se situant entre les « météorides » et les comètes. Faits de roches et de glace, ils pourraient, en étant attirés par la Terre depuis une zone d’accumulation près de Jupiter, après désintégration gravitationnelle, survivre à l’entrée dans l’atmosphère terrestre et, par surchauffe, expulser de l’azote, ce qui produirait une lueur brillante verte et ainsi donnerait un phénomènes pouvant être confondu avec des ovnis de formes sphérique, discoïdale ou cylindrique… Inutile de dire que la preuve de l’existence de ces « cométoïdes » déguisés en ovnis n’a jamais été apportée …

La thèse météore/comète était de toute façon difficile à appliquer au comportement « curieux » des boules de feu vertes vis-à-vis des sites stratégiques US ; mais qu’à cela ne tienne : si tant de boules de feu avaient été vues au-dessus des installations du Nouveau Mexique, c’était selon le Dr Kaplan : « à cause de l’extraordinaire visibilité dans la région et du fait qu’un grand nombre de gens - plus qu’avant - regardaient le ciel ; notamment les gardes de sécurité de plus en plus nombreux « dont c’est le métier et le devoir de se promener dehors la nuit » (sic).

Non élucidée, l’énigme des boules de feu vertes se dilua donc dans le phénomène ovni sachant que la couleur dominante des « lumières nocturnes » n’est pas verte mais jaune (Hynek, 1972).

Notes
1/ Edward J. Ruppelt (1922-1960), « capitaine », dans son livre : « The Report on Unidentified Flying Objects, 1956, consacre un chapitre entier à ces « boules de feu » volantes. Traduction française par R. Jouan, parue en 1958 aux Editions France-Empire, sous le titre « Face aux soucoupes volantes ». Directeur du « Project Blue Book » de 1951 à 1953, Ruppelt fut relevé de ses fonctions par l’armée pour l’avoir accusée d’avoir « étouffé » les événements de 1952 (notamment une vague de boules de feu vertes).
2/ Jerome Clark, in The UFO Encyclopedia, Omnigraphics, Inc., Detroit, MI, 1998.
3/ Les « boules de feu vertes » venaient après :
Ø     les « soucoupes volantes » de K. Arnold (1947),
Ø     le « crash » de Roswell (1947), là aussi au Nouveau Mexique,
Ø     le cigare observé avec hublots, dans la nuit du 23 au 24 juillet 1948, par deux pilotes d’un DC3 des Eastern Airlines, lancé sur une trajectoire de collision et qui évite l’accident en amorçant lui-même une manœuvre en montant en chandelle,
Ø     la boule lumineuse observée en octobre 1948 au-dessus de la base de Fargo dans le Dakota du Nord, dite « contrôlée intelligemment » quand un pilote a voulu la poursuivre en avion et que l’ATIC assimila à un ballon météo !
4/ Le Dr Lincoln La Paz (1897-1985), mathématicien et astronome à l’Université de New Mexico, fut aussi impliqué dans l’enquête sur Roswell en 1947.
5/ A noter que les représentant officiels du projet UFO étaient là en curieux et non en tant que participants, car le phénomène « boules de feu vertes » ne parlant pas de « disques volants », le projet UFO n’avait pas de raison de s’y intéresser ! Authentique et symptomatique d’un singulier fonctionnement de l’administration américaine ! C’est le 11 février 1949 (5 jours plus tôt) que le Projet « Sign » (signe) qui avait fait suite à l’éphémère Project « Saucer » (soucoupe) était devenu le Projet « Grudge » (rancune) !
6/ Un programme de l’Air Materiel Command était celui d’un avion à propulsion atomique lequel fut interrompu en 1961 sans qu’un prototype ne soit construit.
7/ E. Teller (1908-2003), physicien nucléaire, connu comme le « père » de la bombe à hydrogène.

Publié raccourci dans Dimanche Saône & Loire du 20 janvier 2008 et in extenso dans Le Monde de l’Inconnu, n°328, février-mars 2008.
 













jeudi 15 mars 2018

Les fusées fantômes

 Entre les « foo-fighers », ces mystérieux globes incandescents qui vinrent perturber en vol les aviateurs alliés à la fin de la 2ème guerre mondiale, et « l’escadrille de neuf soucoupes volantes » ricochant au-dessus du Mont Rainier (Washington) repérée, en 1947, par l’Américain K. Arnold, depuis le cockpit de son petit avion privé, en matière d’ovnis, une vague d’observations est venue s’interposer, en 1946, en Scandinavie : c’est celle des « fusées fantômes ». Juste dans la période de confusion qui suivit la fin de la 2ème guerre mondiale.

Il s’agissait non plus, cette fois, de points ou sphères lumineux « amorphes », mais de « corps physiques formés » décrits comme des cigares ou des disques. Les journaux français s’en firent l’écho d’autant que certaines observations locales avaient, semble-t-il, la même source (région de la Mer Baltique). Ainsi, en janvier 1946, un avion américain C-54 arrivant sur Paris, « vit une étoile filante brillante apparaître à 35 degrés au-dessus de l’horizon. Elle décrivit une petite hyperbole descendante puis se mit à rebondir ou ricocher pour réapparaître après avoir disparu. A Dijon, le 20 août 1946 : « d’énormes projectiles allongés passèrent au-dessus de la ville à des vitesses prodigieuses et avec un sifflement bruyant ». Des « fusées » furent signalées à Chatillon-sur-Saône et en Lorraine, en septembre.

Mais ce n’était rien par rapport à ce qui se passait en Scandinavie. Selon La Résistance du 19 juillet, « durant les derniers mois, la population du sud de la Suède et quelques témoins au nord ont été profondément troublés en apercevant, de temps à autre, surtout de nuit, des météores brillants, se déplaçant à des vitesses fantastiques et traversant leur ciel ».

L’Aurore du 27 juillet écrivait : « Plus de 500 projectiles propulsés comme des fusées sont dits avoir été vus au-dessus de la Suède depuis le début du mois. Selon certaines sources, ces projectiles qui zèbrent le ciel suédois ressemblent à des avions à réaction mais font beaucoup moins de bruit qu’un engin de ce type ».

Certaines « fusées » furent détectées au radar. Une photo fut même reproduite par le Daily Telegraph, en août, montrant un objet ressemblant à une comète repéré au-dessus de la banlieue de Stockholm. Le cliché agrandi mit bien en évidence la présence d’un « projectile » au milieu des flammes.

Cette rare photo ressemble bien, en effet, à un météore.
Tout avait commencé en février, en Finlande, où une station radio d’Helsinki faisait état « d’un nombre anormalement élevé de gros météores signalés près du cercle arctique ». Le Danemark, la Norvège, la Grèce, l’Italie, l’Afrique du Nord signalèrent ces fameuses « fusées fantômes », comme elles resteront qualifiées dans l’histoire.


En Suède, on les repéra surtout entre mai et juillet 1946. « D’après les services officiels suédois, plusieurs milliers d’observations furent analysées durant cette période », écrit l’ufologue J. Vallée qui en étudia en détail les modalités dans un livre malheureusement jamais traduit en français.

Entre le 9 et le 12 juillet, il y eut une centaine de signalements par jour. Le 6 août, le Ministère de la Défense suédois qui était en alerte permanente annonçait officiellement : « Des fusées radio-contrôlées viennent précisément du sud sur notre région ». Ces « fusées » étaient décrites en vol horizontal avec un bruit « monotone » de moteur turbo-jet. « Une structure en forme de cigare argenté dégringola vers le sol, près de Ockelbo, le 9 juillet, selon le journal Morgon Tidningen ». Plusieurs de ces « fusées fantômes » suivies d’une traînée de fumée  s’écrasèrent ou explosèrent avant de toucher le sol, brisant parfois un grand nombre de vitres. On annonça 80 « crashes » pour la Suède et la Norvège, certains au sol, dans la mer ou les lacs. Dans certains cas, les débris recueillis ne révélèrent rien d’extraordinaire : « des scories non métalliques, plus autres matériaux communs ». Dans d’autres, 12 juillet par exemple à Sundsnall Beach, ce fut « un petit cylindre avec des fragments de papier ou de film accrochés autour » ou bien, en un cas similaire, au Danemark, un fermier trouva fiché en terre un même objet portant des fils de cuivre. On vit les militaires suédois sonder le fond des lacs pour tenter d’y récupérer les restes d’un engin abîmé.

Les descriptions, comme on le voit, étaient diverses et variées mais celles revenant le plus souvent parlaient de « boules de feu avec queue » et d’ «objet brillant en forme de cigare ». Certain engin égaré à basse altitude de 3 m de long présentait même des lettres peintes sur ses flancs ! Beaucoup apparaissaient comme des « objets métalliques », réfléchissant la lumière.

Un pilote de l’armée suédoise, le 14 août, signala un objet cylindrique de 15 m de long et 1 de diamètre, volant 60 mètres plus haut que lui, sans aile ni gouvernail, ni superstructure : comment un tel missile pouvait-il ainsi voler à l’horizontale ? Il y avait là un prototype révolutionnaire ! Du coup, une censure partielle fut imposée à la presse sur le phénomène.

Le 13 août, un groupe de scouts danois observa un objet ressemblant à une fusée passer à grande vitesse à une hauteur de 500 mètres. Le même jour, c’était un objet cylindrique de 1,5 m de long, observé par un témoin à Karlskrona, en Suède. Tout s’estompa mystérieusement à l’automne. A partir de fin 1947, les rapports devinrent sporadiques dans cette région. Restait une énigme  qu’il faut maintenant analyser avec le recul.

Qu’étaient donc ces mystérieuses « fusées fantômes » signalées en nombre en Scandinavie en 1946 ? Des météores, comme on le décréta au début ? Ils avaient des habitudes plutôt curieuses pour un phénomène astronomique somme toute bien connu volant visiblement trop bas ! Des fois à peine au-dessus de la cime des arbres qu’ils faisaient bouger !

De même, pour des bolides, ils se déplaçaient vraiment trop lentement (durée d’observation : plus de 10 minutes près d’Helsinki). Et il y même un cas incroyable relaté par J. Clark, en mai 1946, où le « météore » fut décrit comme une « coupole » (pas loin d’une soucoupe) avec des hublots ovales et des lumières clignotantes. Sous les yeux d’un témoin de Angelholm, à 60 km de Malmo, il atterrit en douceur sur le sol et trois hommes en sortirent portant bottes foncées, lunettes, ceinture noire autour de leur veste et casque transparent sur la tête. Un météore habité !

Bien vite des témoignages divers vinrent infirmer la plausibilité de l’hypothèse météoritique. Le Monde du 9 août 1946 relatait le témoignage du Lieutenant L. Nackman, du Ministère de la Défense suédoise, qui avait vu un des objets comme une sphère de feu entourée de flammes de couleur jaune : il volait à une altitude d’environ 1000 mètres et sa vitesse, malgré sa hauteur, permettait à l’œil de suivre sa course. Selon les experts, un possible météore est absolument à rejeter pour ce cas-là. Le 13 juillet, un objet lumineux maintenant sur tout l’horizon une altitude constante se démarquait aussi nettement de la trajectoire d’un météore.

La deuxième hypothèse fut celle de « bombes volantes » guidées issues de tirs de missiles par l’U.R.S.S, des bombes d’origine germano-soviétique. La Suède, restée neutre durant la guerre, avait-elle été choisie comme champ expérimental, ce qui aurait expliqué ces intrusions dans son espace aérien ? Qui était visé ? « La Suède est devenue une zone secrète pour des tests d’armes », écrivait le Svenska Dagbladet, du 9 juillet. L’apparition cet épisode 10 mois après la fin de la seconde guerre mondiale fut-elle une coïncidence ?

Certains virent dans ces démonstrations « une riposte des Soviétiques aux essais nucléaires américains à Bikini ». Utilisaient-ils leur base de Stolpmünde, non loin de la ville polonaise de Ustka, donnant sur la Baltique ? Mais pourquoi au-dessus de la Suède alors qu’ils disposaient d’un territoire d’expérimentation si vaste ? Ces « bombes » inoffensives étaient-elles lancées pour des raisons psychologiques : une manœuvre d’intimidation ? Les explosions en vol au moins s’expliquaient puisque près d’un tiers de tous les missiles allemands pendant la guerre se désintégrèrent avant d’atteindre leur cible.

Deux arguments étaient avancés à l’appui de cette thèse : les engins semblaient provenir de la direction de Peenemünde, là où les Soviétiques s’étaient approprié les restes du projet d’Hitler de fusée V intercontinentale, et l’intérêt manifeste des Américains dans la situation. Sous couvert d’un déplacement à caractère « pétrolier », le Général J. Doolittle se rendit sur place. Mais, on a appris plus tard, que les Soviétiques, en réalité, étaient tout aussi surpris de l’apparition de ces mystérieuses « fusées fantômes ». La presse communiste eut plutôt tendance de tourner en ridicule ces histoires de « fusées fantômes » ou feignit l’ignorance.

Le champ d’action des sinistres V-2 avait-il été porté à plus de 1000 km en leur ajoutant des ailes (plusieurs témoignages en firent état) ? Des renseignements récents ont révélé (1994) que les Soviétiques ne récupérèrent à Peenmünde/Nordhausen que des miettes (pièces détachées) et qu’il leur fallut 2 ans et demi pour tirer un missile dérivé des V-2 (octobre 1947). Onze V2 reconstituées furent ainsi lancées bien après que l’épisode des « fusées fantômes » se soit estompé comme toute vague d’ovnis qui se respecte.

Les missiles, si missiles il y avait, adoptaient aussi un étrange comportement : ils avaient la faculté de changer de direction. A basse altitude, certains témoins décrivaient des motifs peints en rouge dessus. L’aviation norvégienne, en juillet, se fendit d’une explication qui fit long feu : des phares d’atterrissages d’avions d’un nouveau type en cours d’expérimentation.

S’il s’agissait d’un nouveau type d’engin volant, il se distinguait de ses prédécesseurs par un vol particulièrement silencieux. Etait-il propulsé par un moteur nucléaire ?

Quant au reste, c’étaient des feux d’artifice assurément ou bien « une tornade en connexion avec un éclair ».

La conclusion définitive du Ministère de la Défense suédois, dont un comité spécial avait été nommé dès le 10 juillet pour s’occuper du problème, fut que les rapports à une large majorité résultaient de mauvaises interprétations de phénomènes aériens ordinaires.

Mais un résiduel de 20 % n’avait pu être expliqué. L’incontournable sociologue de service inférait déjà que l’hystérie croissante – la paranoïa - était certainement due aux tensions internationales intenses du moment : début de la guerre froide, contexte de demande publique de réduction des dépenses de défense en Suède.  On parla de « psychose des fusées », d’hallucination collective ou même d’hystérie. Certaines observations ambiguës pouvaient-elles s’expliquer par l’imagination de l’observateur ?

Alors : phénomène astronomique, ou bien « terrestre », « ballons lumineux », tests de fusées récupérées en Allemagne par les Soviétiques ? La « déclassification » de certains documents officiels n’a pas levé l’énigme. J. Vallée souligne que « personne, à l’époque, ne proposa que les engins, qui étaient évidemment réels, pourraient être d’origine interplanétaire ». C’est en effet une lacune qu’il convient de combler. 

 Publié en 2 fois dans Dimanche Saône & Loire des 30 juin et 7 juillet 2002 puis dans  LE MONDE DE L’INCONNU, n°322, octobre-novembre  2006.


Pour en savoir plus :

Loren E. Gross, The Mystery of the Ghost Rockets, 68 pages, publication privée de 1974 et 1982, Fremont, Californie.


 











Jan L. Aldrich, The Ghost Rocket File, Fund for UFO Research, 2000.







samedi 10 mars 2018

Les énigmatiques « foo-fighters ».



Avant même que ne soient inventées les appellations modernes de soucoupes volantes et d’ovnis, les cieux, contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire, n’étaient pas vides d’intrus, loin s’en faut ?

Rare photo de deux "foo-fighters".
Durant la deuxième guerre, des pilotes d’avions du monde entier engagés dans le grand conflit, signalèrent, en plein vol, d’étranges « boules de feu » au voisinage de leur appareil, dont le comportement non belliqueux fut, en tout cas, maintes fois apprécié. Le mystère des « foo-fighters » (« combattants, patrouilleurs fous »), comme Britanniques et Américains les nommèrent, n’a jamais été résolu.
Dès 1942 (voire 1940), ils sont là déjà, semble-t-il. En novembre, une escadre volante anti-sous-marine patrouille dans le Golfe de Gascogne. Tout à coup, le tirailleur de queue repère un « objet massif », sans ailes, apparu brusquement à l’arrière de l’avion. Depuis la tourelle de tête, la chose reste visible pendant 15 minutes puis s’élève en altitude et tourne bride à 180 degrés, avant de se fondre dans le ciel.

Autre cas : le pilote de la Royal Air Force (R.A.F.), B.C. Lumsden, survole les côtes de France dans son Hurricane, en décembre 1942. Il a décollé d’Angleterre à 19 h. A 200 mètres au-dessus de la baie de Somme, il distingue deux lumières qui montent du sol à sa rencontre. Est-ce la D.C.A. ? Non, les projectiles sont trop lents. Il amorce un virage serré et, à sa grande stupeur, les « lumières » se positionnent derrière lui et s’y calent. Il descend à 1000 mètres avec les lumières comme collées à son sillage.

Durant l’année 1943, les foo-fighters (FF) sont très discrets, mais les manœuvres du débarquement des Alliés en Normandie, durant l’été 1944, paraissent les attirer sur les lieux comme des lucioles autour d’un feu. Durant la bataille de France, en août, des boules volantes non identifiées et nocturnes font craindre que les Allemands ont lancé une contre-attaque d’envergure.

En septembre, le caporal canadien Carson Yorke, dans la banlieue d’Antwerp, en Belgique, voit un « globe luisant » traverser de bout en bout l’horizon. Non, ce n’est pas une fusée V2 telle que celles qui, quelques mois plus tôt, ont fait trembler la population.

Mais c’est à la fin de 1944 que les FF donnent le plus de sueurs froides aux aviateurs engagés militairement dans les raids sur l’Allemagne en déroute.

Le 23 novembre, le lieutenant Edward Schlüter décolle de Dijon pour une patrouille de routine destinée à l’interception éventuelle d’engins ennemis à l’ouest du Rhin, entre Strasbourg et Mannheim.

Le ciel est clair, sans nuage. A 30 km au nord de Strasbourg, le lieutenant Ringwald, présent à bord avec un radariste, signale 8 à 10 boules de feu rouge vif qui se déplacent à grande vitesse. Leur disposition groupée les donne « en formation » et elles s’approchent rapidement de l’appareil.

Aussitôt, l’avion contacte par radio le sol qui, lui, ne voit rien - le radar de bord non plus. Schlüter manoeuvre son appareil pour se diriger droit vers les lumières; celles-ci flamboient rouge... et soudain se diluent dans les airs... Deux minutes plus tard, elles sont à nouveau là, mais de l’autre côté de l’avion. Pendant six minutes elles font ainsi escorte, puis, en un clin d’œil, disparaissent.

Le 22 décembre 1944, trois jours avant Christmas (Noël), le lieutenant David McFalls, le pilote Giblin et un radariste, tous trois de la 415ème escadrille de combattants de nuits basée maintenant à Ochey, volent à 3000 mètres au-dessus de Hagenau, à 35 km au nord de Strasbourg.

« Deux lumières très brillantes montent du sol juste devant nous, déclarèrent-ils. Elles se stabilisent en altitude et se placent près de la queue de notre avion où elles demeurent deux minutes. Selon nous, elles sont sous parfait contrôle ». Ensuite, les boules de Noël célestes se détournent et filent au loin...

Toutes ces descriptions de FF, faites sur le vif, se virent, bien entendu, imposer la clause de réserve de secret ordonnée aux aviateurs durant une période de guerre. La presse eut seulement vent de la chose en décembre 1944 « par une fuite ». Ainsi, Newsweek du 25 décembre 1944 titra sur le « puzzle des sphères argentées ». « Des dépêches fortement censurées par les quartiers généraux (sic) révèlent que les pilotes américains ont récemment rencontré un nouveau phénomène au-dessus de l’Allemagne. Quelquefois translucides, volant seules ou en groupe, les sphères sont présumément une nouvelle forme d’interférence aérienne ».

Le New York Times du 2 janvier 1945 faisait sa une en ces termes: « Des boules de feu chassent les chasseurs US dans leur assaut nocturne sur l’Allemagne ».

Autre photo de "foo-fighter" ?
Grâce à la loi américaine sur la liberté de l’information, obtenue de haute lutte notamment par les ufologistes, on sait aujourd’hui grâce aux documents « déclassifiés » que, par dizaines, des séances de débriefing des aviateurs mentionnèrent ces mystérieux « combattants fous », même si les témoins furent quelque peu chahutés par leurs camarades incrédules et en vinrent, finalement, à se taire par peur du ridicule. C’est ainsi qu’on peut citer tous ces témoignages issus de l’US Air Force Historical Research Center de Maxwell AFB, en Alabama.

Malheureusement une loi similaire n’a jamais existé en Allemagne pour les archives de l’armée SS. Si bien que l’on doit s’en tenir à la rumeur qui dit que, tandis que les Alliés rencontraient des FF sur le théâtre des hostilités de la seconde guerre mondiale, en Europe, dans le Pacifique, au Japon..., les pilotes de la Luftwaffe voyaient, eux aussi, des boules de feu inconnues, qu’ils baptisèrent « Kraut-bolids » ou « Kugelblitz » ; ils crurent qu’il s’agissait... d’une nouvelle arme secrète des Alliés !!

Ainsi, révélés initialement par une « fuite », confirmés ensuite dans les séances déclassifiées de debriefing des forces aériennes alliées, les « combattants fous » étaient-ils d’origine allemande? Apparemment non !

Le 12 février 1944, eut lieu le lancement d’une fusée expérimentale au centre d’essai germanique de Kummersdorf. Y assistaient le Ministre de la Propagande Joseph Goebbels, le Reichführer Himmler et Heinz Kammler. L’opération fut filmée.

Quelques jours plus tard, les autorités visionnèrent le film sur lequel, étonnés, ils purent voir très clairement un corps sphérique qui suivait le fusée et tournait autour...

Aussitôt, on suspecta un « coup des Alliés, une manoeuvre d’espionnage ; mais un agent bien informé confia à Himmler que les Anglais, de leur côté, étaient les victimes du même phénomène et pensaient, réciproquement, qu’il s’agissait d’un prototype expérimental allemand.

On s’accorde pour affirmer que les deux camps adverses dénièrent ainsi, chacun leur tour, toute responsabilité concernant les FF.

Le lieutenant Général Massey aurait fait une étude établissant que non seulement les FF n’étaient pas des engins allemands mais que les Allemands pensaient que c’était une arme nouvelle des Alliés.

Mais attention à la désinformation : il faut, cependant être prudent à cet égard. En effet, l’écrivain français, Henry Durrant1, fit sensation en révélant, en 1970, que, confronté aux nombreuses observations de FF rapportées par ses pilotes, « l’Oberkommando der Luftwaffe avait été amené à créer le « Sonder Büro Nr 13 » dont l’activité reçut le nom de code Opération Uranus ».

Voilà qui venait opportunément  conforter la « neutralité » des FF, me direz-vous. Eh bien, on apprit malheureusement que tout cela n’était qu’invention pure de M. Durrant qui n’avait eu aucun scrupule à induire toute la communauté ufologique en erreur uniquement pour voir (sic) « qui oserait reproduire l’information sans le citer ». Lamentable, d’autant que la supercherie n’est pas connue de tout le monde et certains ufologues bien intentionnés continuent de la colporter.

Admettons donc que les Allemands virent des FF. Cela est d’autant plus plausible que leur champ d’action était mondial et non européen.

Outre au-dessus de la France et de l’Allemagne, les FF furent signalés en Norvège, en Italie, en Sicile, au-dessus du Pacifique, de Burma, de la Tunisie, de l’Océan Indien, à Ceylan. Un phénomène mondial en quelque sorte. Selon des informations non vérifiées, ils apparurent aussi durant la guerre de Corée et, plus récemment, en 1992, on en aurait repéré un de nuit au-dessus de la Serbie...

Personne, à ce jour, n’oserait mettre les « chasseurs fous » sur le compte d’une fatigue hallucinogène de pilotes stressés. L’Air Force confirma qu’il n’en était pas question.

Quelque chose était bien là dans le ciel, entre 1940 et 1945, mais quoi ?
Après avoir rejeté l’éventualité de confusion visuelle - reflets sur les ailes des avions, dans les hublots du cockpit ou sur des cristaux de glace suspendus dans l’atmosphère - laquelle fut appuyée par le fait que les FF « marquaient » peu ou pas au radar - la première hypothèse avancée (même officiellement, on l’a vu) fut, bien sûr, que « les Allemands avaient produit une nouvelle arme secrète » (Agence Reuter).

La Luftwaffe avait, en vérité, plusieurs projets d’avions, jets et missiles guidés qui, dans certaines conditions, auraient pu être facilement confondus avec les FF.

Et certains n’étaient pas seulement au stade d’esquisse sur une planche à dessin de bureau d’études, tels le « Brisant » discoïdal ou le projet V7 (réputé extrêmement bruyant alors que les FF furent toujours silencieux!) issu des V2. Les nazis, à partir de leur site de Peennemunde, déplacé à Blizna, en Pologne après sa destruction, avaient développé des engins volants révolutionnaires d’une manœuvrabilité inégalée.

Les FF étaient-ils des missiles (le Me 262, dit Wasserfall) propulsés ou lâchés par des fusées de type V ? Ou bien une aile volante ? Ou la trace d’échappement d’un modèle réduit de Messerschmitt contrôlé par radio, une sorte de précurseur des « drones » actuels ?

Ou alors des véhicules « radioguidés » à vocation antiradar nouvellement développés par les tortueux savants du Troisième Reich ? Leur but : éblouir les pilotes, interférer avec les radars des avions, servir de repère pour les canons antiaériens, couper l’allumage des moteurs en pleine altitude. Étaient-ce des artifices éclairant ?

Cette idée d’arme secrète nazi fut relayée par un article signé de Jo Chamberlin dans « The American Legion Magazine », en 1945.

Rien ne vint corroborer cette pseudo-origine nazi des FF. Et le fait que si arme ils étaient, celle-ci était d’une lamentable inefficacité puisque n’ayant eu aucun résultat notoire sinon de rassurer, en quelque sorte, certains pilotes observateurs récidivistes, coupa court à de telles spéculations. Les Allemands, à l’époque, n’avaient pas l’habitude d’utiliser des gadgets, au contraire. Leur hégémonie était contestée.

Jamais un FF ne manifesta la moindre hostilité - ce qui est un comble pour une arme aussi secrète soit-elle - envers les avions qu’ils approchaient à les toucher (donc à les détruire). Même quand les tirailleurs, craignant pour leur sauvegarde, firent feu sur ces boules de feu oranges trop « affectueuses », les projectiles passèrent simplement à travers. Non, il s’agissait d’autre chose : les FF étaient des lumières amorphes et non pas quelques aéronefs solides.

Cette inconsistance pacifique – arme secrète allemande trop inefficace, trop inoffensive, trop « pacifique » - orienta, dès lors, les suppositions vers l’éventualité d’un phénomène naturel. Pourquoi pas ! Mais lequel ?

Le « phénomène naturel » qui colle le mieux aux descriptions accumulées par les pilotes et les autres témoins des FF est, certes, la foudre globulaire. Tant pis si ce n’était ni la saison, ni les conditions atmosphériques adéquates. Certains y croient encore.

Selon moi, effectivement, la « seule » bonne raison d’assimiler les FF à la foudre en boule est qu’ils lui ressemblaient ; mais cette tentative d’identification s’arrête là, tant leur comportement ne cadrait pas avec cette hypothèse. Cette foudre-là était bien capricieuse !

A moins d’inférer - mais c’est n’importe quoi - que, pendant ces cinq années de conflit mondial, la foudre a adopté une propriété sans précédent ni prolongement, à savoir une attirance marquée pour les avions de chasse et une durée de vie très très allongée. Certains rapports, celui de Bill Leef, notamment, parlent d’une durée d’accompagnement de 45 minutes alors que la foudre n’est stable que durant quelques secondes.

Alors quoi d’autre? Le grand sceptique américain Menzel2 (1901-1976) avança que les FF étaient des tourbillons créés par les dommages de bataille infligés aux avions alliés, ceux-ci étant plus importants à la fin de la guerre !! Comprenne qui pourra. « S’ils relevaient effectivement d’un phénomène naturel, pourquoi ne les a-t-on pas aperçus à d’autres époques », a objecté avec pertinence le Britannique Hilary Evans ? Il y a bien eu d’autres conflits aériens !

Le fameux rapport Condon, confronté au problème, avait sorti de son chapeau une autre possibilité, à savoir le feu de Saint Elme..., manifestation de l’électricité statique. Ses plus surprenantes manifestations dans les annales furent, en décembre 1976, près de Dover, en Grande Bretagne, quand ce phénomène conféra une auréole luisante, « quasi religieuse » à toute une équipe de jeunes footballeurs qui jouaient un match !

En 1897 autour de Noël, près de Chicago, une cause similaire, embrasa les cimes d’une forêt, les arbres « étant illuminés comme si une colonie de vers luisants les avaient investis ». Un phénomène aussi curieux « devait » pouvoir s’appliquer aux FF !

Ovale ou rond, d’un diamètre de 10 à 40 cm de diamètre, il a une apparence incandescente bleu-blanc. C’est mal parti me direz-vous. Mais qu’à cela ne tienne, continuons.

De nature électrique, il est causé par une charge positive induite près des nuages d’orage chargés négativement. Sa durée de vie est celle de la foudre, à savoir quelques minutes maximum. 
Dommage !

Le phénomène demeure près d’un matériau conducteur et ce, d’autant qu’il est pointu. Cette lueur impressionnante a été observée accrochée aux clochers des églises, aux grands mâts des navires, aux extrémités de vergues, aux sommets des arbres, se mouvant le long de fils électriques haute tension et de carlingues d’avion (ah) et quelquefois pulsant. Or certains FF « pulsaient ». Mais…

Cette proposition parachutée fit bondir de mécontentement les membres de la 415ème escadrille qui s’exclamèrent. « Venez donc voler avec nous! On verra si c’est ça ! »

Alors, par contrecoup, les réductionnistes, spécialisés dans la mise à néant de tous les mystères, quels qu’ils soient, se déchaînèrent.

C’étaient des ballons-écrans ennemis, des faux soleils, des météorites, des gremlins de la forêt noire ??

Une tentative de résolution de l’énigme mérite qu’on s’y arrête car elle semble avoir été redécouverte il y a une dizaine d’années par la fine fleur du rationalisme français (voir Science & Vie de mai 1995).

Les foo-fighters étaient-ils dus à une activité tectonique ayant touché, durant cette période, le sud-ouest de l’Allemagne et à l’occasion de laquelle ces boules d’énergie électrique auraient été attirées vers les importantes formations d’avions dans le ciel ?
Philippe Chambon, dans S&V présente cette idée « complètement nouvelle » non pas au sujet des foo-fighters mais dans le cadre d’une théorie capable de fournir une solution à l’ensemble du problème ovni. « Pitoyable », si l’on y regarde de plus près.

En effet, la thèse présentée dans S&V sur le rapport qu’il pourrait y avoir entre le phénomène ovni et les variations de champ magnétique terrestre, en particulier durant les tremblements de terre, date de juste 30 ans, donc très nouvelle, en effet ! Michael Persinger, psychologue (!) canadien, la proposa en 1977 et elle fut développée largement par le Britannique Paul Devereux.

Non les FF n’étaient pas tectoniques ! Plutôt vivants ? Pourquoi pas ressortir aussi cette hypothèse inspirée par l’œuvre de Conan Doyle ? Gardons la tête froide Messieurs les cartésiano-sceptiques !

Le comportement des FF tel que rapporté ici de mon mieux, leur capacité de manœuvre, de disparition momentanée, de ré-émergence en un point différent, tout cela suggère une « autonomie » de mouvement incompatible avec toutes les explications avancées ci-dessus.

Si bien que les ufologues ont beau jeu de les incorporer, en « avant-première » dans l’énigme des ovnis et nous ne pouvons les en blâmer. Ainsi demeurent-ils dans la catégorie « non-expliqués ».

Selon l’expression idoine, les FF semblaient sous contrôle. Mais de qui ?

Une remarque pour finir : ils furent très intimement liés à une phase particulière de l’activité humaine : le plus grand conflit mondial jamais connu. Cet aspect du problème, à mon avis, n’a pas été assez pris en compte et mériterait d’être creusé.

1/ Voir son livre : Le livre noir des soucoupes volantes, Robert Laffont, Les énigmes de l’univers, 1970. Il y rapporte notamment page 76 cet exemple de foo-fighter datant de 1942. Le commandant-pilote Roman Sobinski revenait d’une opération de bombardement au-dessus d’Essen (Ruhr). En passant au-dessus du Zuiderzee au nord de la Hollande, son mitrailleur de queue lui signale un disque lumineux de couleur orange qui les suit. Après différentes manœuvres pour s’en défaire, ordre est donné au mitrailleur de tirer : plusieurs projectiles ont bien l’air de pénétrer dans le cercle lumineux, mais sans résultat, bien que l’objet soit à bonne portée (150 m environ). Enfin le disque volant disparaît à grande vitesse.



2/ Professeur d’Astrophysique et auteur avec Ernest H. Taves du livre : The UFO Enigma, The definitive Explanation of the UFO Phenomenon, Doubleday & Company, New York, 1977.













Le témoignage du pilote Bill Leef.

Opération « Loup Solitaire »
« C’était une sombre et froide nuit de novembre 1944, raconte Bill Leef, pilote de bombardier B-17. Le 24, précisément.

« Dans le cadre du programme « Loup Solitaire », notre mission nocturne n’était pas, comme tant d’autres, de noyer sous une avalanche de bombes les objectifs stratégiques allemands - raffineries principalement - mais plutôt de harceler les nazis en détruisant, ce jour-là, par une frappe plus « chirurgicale », la voie ferrée de la gare de triage de Salzburg.
           
Un compagnon pour « Vieux Corbeau ».
« Divers problèmes techniques nous amenèrent à différer notre objectif sur Klagenburg: un des moteurs de notre bombardier s’était littéralement désintégré. Nous lâchâmes donc nos 500 livres de bombes sans essuyer le moindre tir de D.C.A., ni entrevoir le nez d’un Messerschmitt.

« Rien qu’en cela, la mission était mémorable. Mais elle le devint encore plus peu après.

« Soulagé, je mis le cap sur Trieste, notre base, quand, soudain, apparut une lumière globulaire ambrée juste au bout de l’aile gauche de « Vieux Corbeau », notre avion.

Angoissante présence.
« Personne parmi les dix membres de l’équipage ne l’avait vue s’approcher. Sa forme était parfaitement sphérique et sa couleur jaune-orangé lumineux. Selon moi, elle se situait à 10 mètres au plus de l’extrémité de l’aile et son diamètre devait être de l’ordre de 3 mètres. Une réelle fascination m’habitait en la voyant là si proche et potentiellement dangereuse au point de nous anéantir à tout moment.

« Les tireurs de l’équipe, toujours désireux de faire un carton, manifestèrent l’intention de lui tirer dessus avec leur calibre 50, mais je leur commandai de n’en rien faire. Si la chose avait été hostile envers nous, elle nous aurait descendus bien avant que l’on se soit aperçu de sa présence.          

Escorte et extinction.
« Nous continuâmes donc notre chemin, en direction du sud de l’Italie accompagnés de cette boule lumineuse bizarre qui ne changea moindrement ni de forme, ni de coloration, ni de position par rapport à nous. Je suis affirmatif, cela n’avait rien de naturel et ce n’était pas un engin manufacturé.

« Après 40 à 50 minutes, notre compagnon d’un autre monde (sic) s’éteignit à la manière d’une ampoule électrique dont on coupe l’alimentation.

« Le retour à Amendola se continua sans histoire et, après avoir atterri normalement, un officier du 2ème groupe d’opération de bombardement vint avec nous procéder au debriefing. Je mentionnai l’insolite rencontre et l’explication immédiate du supérieur fut que nous avions eu affaire à « une nouvelle arme secrète allemande ».

Objection, mon lieutenant.
« Mais il ne nous a fait aucun mal, m’écriai-je! L’officier répliqua alors que la chose devait avoir transmis par radio notre altitude, notre vitesse, données qu’utiliseraient les responsables germaniques de la défense antiaérienne pour mieux nous ajuster une prochaine fois.

« Pour nous, cette explication ne tenait pas la route. Nous gardâmes le sentiment, partagés par nombre de nos collègues confrontés à la présence « passive » des « foo-fighters », qu’ils n’étaient pas une arme adverse mais plutôt qu’ils nous assistaient dans notre effort de guerre ».

Ainsi se termine le récit du pilote américain Bill Leef sur une note d’ambigüité mêlée de scepticisme quant aux intentions réelles des « foo-fighters ». Cet avis, non isolé, rejoint, au contraire beaucoup d’autres, dont notamment, ceux de la 415ème escadrille de chasseurs de nuit, basée à Dijon Longvic...

Déplorons déjà cependant le navrant déphasage d’opinion entre les aviateurs confrontés physiquement au problème et l’état-major obsédé par l’évolution des moyens de l’adversaire.



Publié en 3 fois dans Dimanche Saône & Loire des 11, 18, 25 juin et 2 juillet 1995 et globalement dans Le Monde Inconnu n°327, août-septembre 2007.

Pour en savoir plus :Mark Ian Birdsall: UFO's over Europe 1943-48, Quest Publications, 1989.